Télétravail : une ressource inhumaine ?
Le télétravail a clairement permis à de nombreuses entreprises de maintenir leur activité pendant le confinement. Après une phase d'observation, il a même permis à certaines organisations de réaliser des économies en rendant tout ou partie de leurs bureaux. Il convient néanmoins d’être prudent quant à son impact sur la motivation et la performance des salariés.
Envahissant nos habitations en mars 2020 et entrainant des modes d’organisation difficiles, le télétravail partiel s'impose comme une composante de la vie des entreprises dans le "monde d'après". Il est d'autant plus primordial pour les sociétés désireuses d’instaurer ce mode de travail à long terme, de rester vigilantes quant aux conséquences psychologiques et sociales que ce dernier pourrait entrainer chez les collaborateurs.
Nous l’observons depuis un an maintenant, le distanciel présente de nombreux avantages pour l’employeur comme pour le salarié : réduction des dépenses de l’entreprise, gestion du temps et autonomie, baisse des interruptions et du parasitage de bureau ... Mais il engendre également de nombreux risques psycho-sociaux.
Poussant à l’hyper-connectivité, le télétravail tend à effacer la frontière vie pro vie perso, entraîne l’isolement et multiplie le stress lié aux objectifs et à la pression exercée par certains dirigeants pour obtenir plus de rentabilité.
Selon l’étude HP sur la transformation du monde du travail : 31 % des salariés interrogés se sentent moins loyaux envers leurs employeurs lorsqu'ils télétravaillent.
L’étude ClickShare révèle également que : 38% des employés français interrogés ont trouvé que le travail à domicile devenait moins agréable au fur et à mesure que le temps passait.
Un mode de travail à priori libérateur qui a rapidement montré ses limites
Selon la dernière enquête d’empreinte Humaine, l’état psychologique des salariés ne s’est pas amélioré après 1 an de crise. 45% d’entre eux continuent à être en détresse psychologique. Un chiffre d’autant plus important chez les jeunes : 62%. Le cabinet révèle que les cas de dépressions chez la population active ont explosés ! passant de 21% (fin 2020) à 36% (mars 2021). 40% des salariés disent saturer du « full remote » et plus particulièrement du manque de lien social.
Télétravail généralisé : Ces salariés qui rêvent de retourner au bureau
Si seulement 37% des télétravailleurs jugent le travail à distance “moins efficace”que le présentiel, 70% des 18-34 ans exprime le besoin de retourner au bureau selon une enquête Odaxa.
« Moins autonomes, plus isolés, contraints à travailler dans des logements plus petits » les 18- 34 ans « vivent une plus mauvaise expérience que leurs aînés ».
« 60% d’entre eux ont le sentiment d’être moins productif à distance » : sentiment d’inefficacité et de surcharge de travail. Si seulement 37% des télétravailleurs jugent le travail à distance « moins efficace » que le présentiel, 70% des 18-34 ans -une majorité écrasante- exprime le besoin de retourner au bureau selon l’enquête Odoxa.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le travail à distance ne fait pas si bon ménage avec la nouvelle génération. Le manque d’accompagnement déploré par cette dernière soulève un point important du télétravail.
Télétravail généralisé : Le péril jeune
Pour les jeunes actifs qui débutent dans le monde de l'entreprise, le distanciel semble amplifier le stress des premiers pas.
Pour eux, les échanges au bureau jouent un rôle essentiel. Or, le travail à distance brise les liens sociaux et rend la construction identitaire professionnelle difficile. La difficulté à être reconnus et encouragés en télétravail n’agit pas en faveur de leur épanouissement professionnel. Une pression supplémentaire se fait également sentir en raison d’une grande incertitude quant à leur avenir professionnel et la difficulté à être embauchés. Une raison qui pousse les nouveaux entrants à mettre les bouchés doubles pour assurer le maintien de leur emploi. Des efforts menant très souvent au surmenage.
Selon un sondage mené par OpinionWay « 70 % des travailleurs de moins de 29 ans sont en détresse psychologiques, soit deux fois plus que les 50-59 ans ».
La difficulté d’insertion ou le manque de lien d’encadrement poussent certains d’entre eux à poursuivre leurs études pour retarder leur arriver sur le marché du travail en attendant un retour à de meilleures conditions. Courrier cadre révèle également que, dans ces
conditions, 20% des nouveaux embauchés en CDI mettent, d’eux même, un terme à leur période d’essai.
Dans cette période de pandémie mondiale et de télétravail forcé, l’étape de l’intégration est trop souvent délaissée. Elle est cependant non négligeable et devient encore plus importante à distance.
« Il devient nécessaire de réfléchir au fonctionnement de l’entreprise particulièrement pour les Millenials, qui agissent plus collectivement que l’ancienne génération », selon Xavier Alas Luquetas, coach spécialiste des risques psychosociaux et de la vie au travail.
Télétravail généralisé : La réponse des entreprises
Certaines pratiques visant à faciliter l’arrivée des jeunes travailleurs à distance, ont d’ores et déjà été mise en place :
#1 Le parrainage : destiné à conseiller et accompagner les recrues par le biais d’échanges informels par exemple. Les tuteurs jouent un rôle crucial dans l’évolution personnelle et professionnelle des nouveaux. Ils sont pour eux une véritable ressource qui les aide à s’inscrire dans leur nouvel environnement et à adhérer à la culture, la vision et les valeurs de l’organisme avant de s’atteler à des tâches opérationnelles.
#2 Le soutien RH : destiné à organiser des entretiens individuels pour s’assurer du bien-être des télétravailleurs et fournir, le cas échéant, un kit de télétravail.
#3 l’aménagement des temps distanciel / présentiel : pour permettre à ceux qui en auraient le plus besoin, de se rendre au bureau plus souvent.
Mais ces mesures semblent insuffisantes. Les réfractaires du télétravail se lamentent de la qualité de leurs outils de communication et du soutien managérial. Le côté social manque également aux amateurs des organisations à identité et culture forte. L’absence d’after work et de « base camp » laisse les jeunes sur la réserve. Ces derniers décrivent la situation actuelle comme « impossible », « contraignante », « compliquée » et « isolante ». Un avis qui pourrait finalement s’avérer commun à bon nombre de collaborateurs.
« L’enjeu pour les entreprises est de trouver le juste milieu entre bienveillance, écoute, suivi et supervision », d’après Arnaud Gilberton, directeur pédagogique à l’ESSEC et fondateur d’idoko. Il devient essentiel pour elles d’opter pour des manager-coachs afin d’assurer l’accompagnement et le développement de chacun. Le travail est considéré comme un lieu d’apprentissage et de challenge chaque jour. L’intégration des nouvelles générations doit perdurer et s’inscrire dans une politique d’entreprise globale.
La mise en place d’un télétravail à 100 %, sur le long terme, semble ainsi inenvisageable pour les jeunes professionnels qui ressentent davantage l’isolement du travail à distance. Une réorganisation plus souple et plus centrée sur l’humain, visant à combiner télétravail et présence au bureau serait à envisager.
Le bureau : Un lieu de sociabilité
Dans le contexte actuel le bureau joue plus que jamais un rôle social et relationnel dans la vie d’un individu.
Au-delà d’un lieu d’activité professionnelle, il est aussi un espace de partage, d’échange et de cohésion.
Dans la période que nous traversons, le bureau représente même le seul lieu de sociabilité pour de nombreux salariés.
Selon l’étude Paris Workplace, réalisée en 2019 par l’IFOP pour le compte de la foncière SFL, le lien social était déjà, pour les salariés interrogés, la première raison de se lever le matin pour se rendre sur son lieu de travail.
Top 5 des raisons de se rendre au travail avant la pandémie :
- Etre reconnu par ses supérieurs
- Travailler en commun sur des projets
- Faire pleinement partie d'une équipe
- Travailler plus efficacement
- La vie sociale avec les collègues
Et cela est encore plus vrai PENDANT LA PANDÉMIE ! L’étude Paris Workplace septembre 2020 dévoile que la vie sociale avec ses collègues est la première raison de se rendre au bureau pour 55% des interrogés.
Comme le dit si bien un article des Echos, une société « est avant tout le résultat de la coopération entre les collaborateurs » ce qui révèle, une fois de plus, l’importance de préserver le lien social pour la réussite des entreprises.`
D’ailleurs, selon Jean-Michel GARRIGUES, Directeur associé, en charge des RH et du Développement chez BLB Associés, interrogé par la revue Question(s) de Management, « la cohérence collective dépend beaucoup du partage des moments informels du quotidien professionnel ».
Le retour au bureau : Un réel enjeu pour les entreprises
La crise du Covid a modifié nos méthodes de travail de façon précipitée et les interrogations sont aujourd’hui multiples :
Comment contrer les risques de pandémies sur le lieu de travail ? Qu’attendent les salariés de leur retour au bureau ? Quelle stratégie immobilière adopter ?
Malgré une expérience plutôt positive du télétravail pour la majorité des salariés, le bureau reste le lieu d'activité privilégié.
Une enquête menée par Deskeo révèle d’ailleurs que “76% des personnes interrogées regrettent leurs bureaux”.
Seul bémol, 56 % des actifs appréhendent le respect des règles sanitaires et redoutent le retour en entreprise, selon une étude Malakoff Humanis.
Pour faire face aux enjeux de sécurité et de santé, les entreprises devraient, à l’avenir, se pencher sur 3 points clés :
L'aménagement des espaces de travail
Dans lequel le design pourrait en partie aider à transformer les comportements des individus et leur permettre de se tenir à bonne distance les uns des autres : bureaux espacés, signaux visuels, formes circulaires au sol.
La technique lourde des bâtiments
Qui amènera très certainement les entreprises à favoriser des immeubles de bureaux où la qualité de l’air fera l’objet d’une véritable préoccupation afin de limiter les risques de propagation de virus et autres maladies. Les bâtiments certifiés pourraient être privilégiés.
La gestion des flux et des rencontres
Qui devra très probablement nécessiter, sur le long terme :
- Maintenir un sens de circulation unique dans les parties communes
- Conserver des portes d’entrées et de sorties différentes
- Limiter le nombre de personnes dans l’ascenseur
- Eviter le face-à-face dans les bureaux partagés
- Permettre une distance d’au moins un mètre entre les collaborateurs
Et ainsi passer du smart building au safe building.
Désormais perçu comme un univers collaboratif, le bureau, tel qu’on le connaissait avant la pandémie, laisse place à une organisation du travail en deux temps :
- Le distanciel pour les tâches individuelles
- Le présentiel pour assurer le travail d’équipe, la cohésion, et la
créativité.
En outre, les entreprises devraient désormais miser sur une stratégie plus hybride dans laquelle siège social plus flexible et plus central, télétravail et tiers-lieux cohabitent. De fait, à l’avenir, les salariés souhaitent travailler :
- 22% : 100% au bureau
- 15% : Bureau = Projets Collectifs
- 60% : Mix Bureau et Télétravail
- 3% : 100% à la maison
Où allons-nous travailler dans un monde post-Covid
Si le télétravail a globalement été bien adopté, il a été et est encore très diversement vécu en fonction du logement, de la situation familiale et du poste occupé, et dévoile d’indéniables limites.
Nous pouvons donc affirmer que la société ne s’oriente pas aujourd’hui vers « la fin des bureaux » mais bien « l'hybridation des solutions ».
En effet, la plupart des collaborateurs aspirent à une solution de « bureau à la carte » mixant : télétravail, solutions alternatives en coworking ou dans des tiers lieux, et bureaux interactifs pour les projets collaboratifs…
Si cela peut sembler assez simple sur le papier, l’emplacement, le confort - similaire voire supérieur à celui de la maison – et la sécurité vont devenir un véritable défi pour les entreprises.
L’immeuble de bureau doit aujourd’hui être le reflet de l’identité de l’entreprise, lieu d’événementiel et de rassemblement, créateur d’intelligence collective et d’innovation.
Partir à l’aube avec son ordinateur sur le dos et faire plus d’une heure de trajet pour se rendre dans un bureau individuel n’a plus aucun sens. Le futur de l’immobilier tertiaire réside désormais dans le partage : accueil, services, convivialité ... justifiant un intérêt pour des locaux plus centraux.
Les salariés souhaitent « consommer » leur environnement de travail au sens large : le bureau & le quartier.
Selon l’étude Paris work Place 2020 :
Le quartier de travail a été important dans le choix de rejoindre son entreprise pour :
- 44% des 25-30 ans
- 42% des 30-35 ans
- 41% des 35-40 ans
- 42% des 40-45 ans
Un facteur cependant moins essentiel pour les 45 ans et plus.
En conclusion, si le télétravail devient la règle, l’entreprise s’expose à d’importants désagréments puisqu’il ne répond pas aux aspirations des salariés qui restent encore très attachés à leur environnement de travail et à la cohésion d’équipe !
L’absence de frontière entre vie privé / vie professionnelle et le sentiment d’isolement représentent de véritables risques pour la santé des salariés comme pour celle des sociétés.
Aussi, les entreprises qui feront l’effort de maintenir des espaces de bureaux et de rencontres bénéficieront d’un véritable avantage dans leurs processus de recrutements et la fidélisation de leurs équipes.
Mais parce la solution toute faite n’existe pas et qu’un projet immobilier ne se résume pas uniquement à des m2, Arthur Loyd, Premier Réseau National de Conseil en Immobilier d’Entreprise, mobilise et coordonne l’ensemble de ses ressources et expertises pour proposer aux entreprises, LA formule idéale (espaces, modes de travail, performance, bien-être, maitrise budgétaire...) qui transformera leurs défis d’aujourd’hui en réussite de demain.